
La copie fidèle suffit-elle pour faire de la dématérialisation fiscale ?
Plusieurs confusions se cachent dans cette interrogation. Il convient de préciser le sens de ces expressions pour les comprendre. En réalité, ces deux notions sont totalement disjointes.
La copie fidèle est définie dans plusieurs contextes, plusieurs cadres légaux.
La copie fidèle (ou fiable) est un processus qui permet de produire une copie électronique d’un original papier et de conférer à cette copie la même valeur probante que son original. Il est même possible, sous conditions de conservation durable de la copie fiable et d’exposition des procédures de production de cette copie, de détruire l’original ainsi copié fidèlement.
L’ordonnance du 10 février 2016 de l’article 1379 du Code civil indique : « La copie fiable a la même force probante que l’original. La fiabilité est laissée à l’appréciation du juge. Néanmoins est réputée fiable la copie exécutoire ou authentique d’un écrit authentique. Est présumée fiable jusqu’à preuve du contraire toute copie résultant d’une reproduction à l’identique de la forme et du contenu de l’acte, et dont l’intégrité est garantie dans le temps par un procédé conforme à des conditions fixées par décret en Conseil d’État. Si l’original subsiste, sa présentation peut toujours être exigée ».
Un décret d’application 2016-1673 pris le 5 décembre 2016 précise les conditions de fiabilité de la reproduction par voie électronique. Les exigences énoncées concernent :
- L’informations sur la copie;
- La qualité ;
- L’intégrité ;
- La conservation de la copie ;
- La lisibilité dans le temps ;
- La traçabilité ;
- La sécurité ;
- La documentation.
La norme NF Z42-026, publiée par l’AFNOR représente les bonnes pratiques pour la mise en œuvre de la copie fiable du code civil. Cette norme, précise les exigences fonctionnelles et techniques liées à la qualification et au paramétrage de la chaîne de numérisation et au processus de numérisation. L’AFNOR propose la certification NF544 de conformité à cette norme.
La copie fidèle des factures fournisseurs dans le cadre du code des impôts.
L’article A102 B-2 du livre des procédures fiscales publié le 22 mars 2017 reprend et précise les concepts cités par le décret d’application du 5 décembre 2016 (reproduction à l’identique, en couleur, archivage numérique et contrôles durant toute la durée de conservation, utilisation du format PDF A/3 assorti d’un mécanisme de protection par signature, scellement ou empreinte numérique, horodatage)
Il devient ainsi possible de supprimer l’original papier pour lui substituer la copie fiable d’une facture.
La copie fidèle est une excellente pratique concernant les factures reçues sous la forme papier. Pour autant, elle ne rentre pas dans le cadre de la dématérialisation fiscale.
En effet, la confusion provient du terme dématérialisation. Ici la dématérialisation est appliquée après réception de la facture : On numérise une facture reçue physiquement en papier. L’échange entre le fournisseur son client s’est donc effectué sous forme physique ou matérielle alors que la dématérialisation fiscale organise un échange originellement dématérialisé entre les deux parties.
La dématérialisation fiscale prévoit plusieurs types de factures électroniques.
Le code des impôts définit le cadre des échanges dématérialisés de factures.
Celles-ci peuvent être :
- Non structurées : il peut s’agir d’un PDF (simple ou signé) sans fichier l’accompagnant, et l’information transmise est non structurée ;
- Structurées : il s’agit de données de facturation directement lisibles par une machine, par exemple facture EDI, quel que soit son format ;
- Hybrides : un fichier électronique embarquant un fichier lisible par un œil humain « standard » (un PDF souvent), qui est l’original fiscal, et un fichier de données de facturation directement exploitable par une machine. Les deux exemples les plus connus sont l’UBL Light (un EDI XML encapsulant un PDF) et la Factur-X (un PDF encapsulant un EDI XML – soit l’inverse de l’UBL Light).
La généralisation de la dématérialisation fiscale.
La généralisation de l’adoption de la facturation électronique dans le domaine des relations entre entreprises et administration publique (B2G) a été menée de 2017 à 2020.
C’est maintenant le projet de généralisation des factures électroniques entre entreprises (B2B) qui est lancé, à la suite de l’adoption de la loi de finance de 2021 autorisant le gouvernement à agir par ordonnance. L’obligation d’émission sera étalée de 2023 à 2025 en fonction de la taille des entreprises. L’obligation de réception sera pour toutes les entreprises à partir de 2023.
Le terme dématérialisation employé pour les échanges de factures électroniques s’explique par l’échange de fichiers plutôt que de papier.
Alors, si la numérisation des factures fournisseurs permet de dématérialiser les archives et dossiers fournisseurs, ce qui s’avère pratique et économique, cela ne répond pas à l’obligation d’accepter les factures électroniques.
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